En RDC, les autorités sont encore dans la tourmente après le meurtre de l’ambassadeur d’Italie Luca Attanasio, son garde du corps et un chauffeur congolais du programme alimentaire mondiale (PAM) lundi au nord de la ville de Goma. Désormais, l’encadrement des déplacements des diplomates sera plus strict.
Le président Félix Tshisekedi a présidé une nouvelle réunion de haut niveau sécuritaire au palais présidentiel mardi. Il y a été décidé que désormais, plus aucun ambassadeur ou chef de mission diplomatique ne sera autorisé à quitter la capitale Kinshasa sans avoir informé le chef de la diplomatie congolaise et les services de sécurité.
« Les diplomates, avant de quitter Kinshasa, doivent absolument informer le ministère des Affaires étrangères qui lui-même va informer les autres instances, les autres institutions de la République qui sont concernées par les déplacements de ces diplomates. Et certainement nous allons particulièrement leur demander de se signaler lorsqu’ils arrivent quelque part auprès des instances qui gèrent la localité, la ville ou la province », explique la ministre des Affaires étrangères, Marie Ntumba Nzenza.
Le gouvernement soutient toujours qu’aucun service n’était au courant des déplacements de l’ambassadeur d’Italie. Une enquête doit avoir lieu pour établir les circonstances du drame. « Nous l’avons perdu dans des circonstances que nous allons élucider car nous allons tout faire pour pouvoir comprendre ce qu’il s’est passé et nous avons parlé des problèmes connexes qui sont des problèmes militaires reliés à ça », rajoute la ministre.
L’Italie a également demandé à l’ONU l’ouverture d’une enquête et des « réponses claires » après la mort de son ambassadeur, a déclaré mercredi le chef de la diplomatie italienne. « Nous avons formellement demandé au PAM et à l’ONU l’ouverture d’une enquête pour faire la lumière sur ce qui s’est passé, les raisons justifiant le dispositif de sécurité mis en place et à qui incombe la responsabilité de ces décisions », a déclaré Luigi Di Maio devant les députés.
« Une très forte augmentation de ce type d’incidents depuis environ un an »
Cette région de l’est de la RDC est connue pour la présence de groupes armés. En 2020, 122 groupes armés sévissent dans le Nord-Kivu, le Sud-Kivu, l’Ituri et le Tanganyika, selon le baromètre sécuritaire du Kivu, projet mis sur pied par Human Rights Watch (HRW) et le Groupe d’études sur le Congo (GEC) de l’Université de New York.
Cependant, « c’est très rare que des diplomates soient visés dans l’Est du Congo », note Pierre Boisselet, coordinateur du Baromètre sécuritaire du Kivu. « Ceci étant, si l’on prend l’hypothèque que c’était une tentative de kidnapping, ce qui semple aujourd’hui le plus probable au vu des éléments que l’on a. Il faut dire que les kidnappings ne sont pas rares dans ce territoire du Nord-Kivu », rajoute-t-il.
Selon le dernier rapport, « on a même vu une très forte augmentation de ce type d’incidents depuis environ un an. On en a recensé 18 au niveau du baromètre sécuritaire du Kivu en 2020, à comparer avec 3 en 2019 et 4 en 2018 donc une nette augmentation ». Mais quasiment aucun de ces kidnappings « ne visaient des convois humanitaires ni se sont produits sur le tronçon précis de la route nationale 2 », rajoute l’expert.
Pascal Mulegwa et Patient Ligodi (RFI)